Intervention de Michèle PILOT sur la coopération transfrontalière

Session du 20 novembre 2017 | Débat à la Maison de la Grande Région à Esch-sur-Alzette
Michèle PILOT, Président du groupe socialiste, écologiste et républicain

Rapport de coopération transfrontalière

Madame la Présidente de la Grande région,

Madame la Ministre,

Tout d’abord, je tenais à vous remercier pour votre accueil aujourd’hui à Esch-sur-Alzette. Je ne pouvais pas étant accueillie dans cette ville, ne pas vous féliciter pour la désignation de la ville comme capitale européenne de la culture pour 2022.

C’est une jolie reconnaissance qui rappelle la désignation de Luxembourg en 1995 et en 2007. La culture est un formidable vecteur de lien et de partage entre les citoyens européens.

Cette session du conseil départemental de Meurthe-et-Moselle délocalisée illustre les liens qui unissent notre département et ses voisins européens.

La grande région est un espace à part entière de 11 millions et demi d’habitants, un mélange de culture germanique et latine.

Ce sont des territoires si différents avec pourtant avec beaucoup de points communs :

  • Des réalités socio-économiques communes
  • Des régions industrielles historiques
  • Des partenariats commerciaux
  • La 1ère zone de l’Union européenne en termes de travailleurs transfrontaliers

La Grande Région, c’est surtout la recherche de l’Europe des citoyens. Pour cela, il faut accompagner leur quotidien, penser la mobilité, l’habitat, les services, le partage de la langue, les bassins d’emplois.

La mobilité est un enjeu qui est au cœur du quotidien des frontaliers.

Si les premières situations de saturation sont apparues sur certains secteurs en 1985, c’est véritablement dès 2010, qu’une asphyxie est apparue tant près des frontières franco-luxembourgeoises, franco-allemandes, sur des axes comme l’A31, l’A30, des secteurs économiques comme la cloche d’or et le Kirchberg pour le Luxembourg, les secteurs de Sarrebrück, Trèves et les axes vers la Belgique.

Il y a nécessité à travailler de concert sur les solutions qui peuvent être apportées :

  • En amplifiant le recours au covoiturage
  • En renforçant l’offre de service en matière de transports en commun
  • En favorisant une approche multimodale de la mobilité des citoyens
  • Il faut aussi penser les routes du futur : les routes respectueuses de l’environnement, les routes connectées garantes de la sécurité des usagers. Notre territoire de la grande région doit être porteur d’une nouvelle vision de la mobilité.

J’évoquais tout à l’heure, l’Europe des citoyens, elle ne peut se faire sans partager aussi la langue du voisin, c’est un enjeu d’échange mais aussi en termes d’emploi.

Pour travailler dans un autre état, il est primordial de parler la langue usuelle. Sur ce point, j’insiste sur le fait de maîtriser la langue professionnelle. Cela dépasse l’apprentissage classique mais au contraire s’appuie sur l’acquisition des termes techniques qui font parfois défaut aux travailleurs frontaliers.

Un autre enjeu lié ne doit pas être oublié, celui de la formation et dans ce domaine nous devons renforcer nos coopérations pour favoriser :

  • Des formations orientées vers les métiers qui recrutent ou qui recruteront demain comme par exemple la sécurité informatique ou la transition énergétique. En intégrant les conséquences de la révolution digitale de la société
  • La reconnaissance des diplômes
  • La validation des acquis et de l’expérience pour permettre à un salarié qui a exercé dans un pays voisin pendant des années de voir reconnu l’acquisition de ses compétences dans le nouveau pays d’emploi

Cette grande région doit aussi pouvoir coopérer dans le domaine du co-développement des territoires.

Les territoires ne doivent pas se développer côte à côte mais ensemble.

  • Il nous faut être en capacité de favoriser un développement équilibré des territoires qui anticipe les besoins, qui tient compte à la fois des problématiques territoriales mais aussi des potentiels des secteurs.
  • Le développement territorial doit nous pousser à nous poser conjointement les questions entre partenaires :
    • Quels impacts entraîne la création de nouvelles zones commerciales ? Quels impacts sur les zones de chalandises ?
    • Comment répondre aux besoins de services lors de la création de nouveaux quartiers proches des frontières ?
    • Quelle mobilité quand nous développons des centres d’emplois qui vont impacter les flux existants ?

Cette grande région, c’est une chance de coopérer tous ensemble en pensant l’aménagement non strictement à l’intérieur de nos frontières mais bien dans la réalité de ses conséquences sur tous les territoires impactés.

  • Pour cela, il serait opportun de renforcer nos collaborations en matière d’études croisées et d’observatoires afin de mieux appréhender les processus spatiaux
  • Il faut aussi élaborer des documents de planification transfrontalière

En collaborant sur les enjeux du devenir des territoires, nous pourrons anticiper les évolutions de société comme le vieillissement de notre population et les besoins en habitat, les opportunités pour une silver économie au service de la qualité de vie des seniors.

Enfin, un élément me paraît à évoquer car il peut constituer un trait d’union entre nous : la création d’une identité commune. La culture, le tourisme, notre passé partagé, nos richesses territoriales sont des socles qui peuvent nous aider à construire « une identité Grande région ».

Face à ces vastes chantiers qui nous attendent dans le cadre de la grande région, je reprendrai cette phrase de Jean Monnet : « ce qui est important, ce n’est ni d’être optimiste, ni pessimiste, mais d’être déterminé ».

Je vous remercie.