L’assemblée départementale s’est réunie en séances plénières les lundi 19 et mercredi 21 septembre 2022. Retrouvez le discours d’ouverture de Chaynesse Khirouni, Présidente du Département, pour cette session.
Mesdames et Messieurs les élus, chers collègues,
A quelques jours de l’automne, permettez-moi de revenir sur un été qui a inscrit, plus encore que les précédents, la réalité de la crise écologique dans nos quotidiens, marquée par les incendies, la sécheresse, les pluies diluviennes.
Le denier rapport du GIEC confirme, sans équivoque, le lien entre le réchauffement de la planète et l’activité humaine. Il nous invite à repenser notre modèle économique basé sur la croissance et à envisager un monde caractérisé par une forte coopération internationale donnant la priorité à la transition écologique.
Sans cette réorientation radicale, seule en mesure de garantir une chute drastique de nos émissions de gaz à effet de serre, le seuil d’1.5°C de réchauffement pourrait être atteint dès 2030 ; soit 10 ans plus tôt que la précédente estimation du GIEC.
Justement, le rapport du GIEC sur le climat évoque notamment les dangers de la montée du niveau de la mer qui est engendrée, entre autres, par la fonte des calottes glaciaires. Le niveau de la mer pourrait connaître une hausse de 20 cm d’ici 2050, voire d’un mètre d’ici 2100. Les villes de faible altitude pourraient devenir totalement inhabitables et générer, avec d’autres causes cumulatives telles que la pénurie en eau et les famines, des phénomènes de migration climatique amplifiés.
Ce rapport fait froid dans le dos et montre que notre maison brûle et que nous ne pouvons plus regarder ailleurs… Après des décennies de déni, puis de réformes timides ou d’inaction, l’urgence climatique s’impose, accompagnée d’une urgence sociale caractérisée aujourd’hui par une flambée des prix de l’énergie.
A titre d’illustration, le renouvellement du marché d’électricité de notre collectivité, recouvrant également le SDIS et les collèges, intervenu la semaine dernière, a eu pour conséquence une multiplication par 4,3 de cette charge pour notre collectivité.
Notre projet départemental rappelle que la transition écologique nous engage, même si ses défis sont mondiaux et que les réponses relèvent de tous les niveaux avec une responsabilité plus grande des États. Mais leurs actions sont encore aujourd’hui bien en deçà des objectifs qu’ils ont eux-mêmes définis ; ceux de l’accord de Paris pour limiter le réchauffement climatique et la stratégie nationale bas-carbone qui vise la neutralité CO2 d’ici 2050.
La crise énergétique que nous traversons nous invite d’ailleurs à prendre conscience de ces enjeux. Elle préfigure aussi ce que bien des scientifiques nous invitent à anticiper : l’abandon progressif des énergies fossiles.
Notre collectivité, au nom du pacte républicain, de l’esprit de responsabilité qui l’anime et de son devoir d’exemplarité auprès des habitants, se doit de prendre sa part aux efforts attendus par nos concitoyens.
C’est la raison pour laquelle j’ai demandé à notre administration qu’elle élabore un plan de sobriété énergétique comprenant à la fois son propre fonctionnement mais aussi ceux de nos partenaires, à commencer par les collèges, très gros consommateurs d’énergie.
Le Département, garant des solidarités humaines, entend, à son échelle, répondre aux défis climatiques mais en assurant ses cœurs de missions qui le place aux côtés des habitants économiquement et socialement les plus fragiles, les plus modestes.
Car il ne serait pas juste que les efforts demandés à nos concitoyens ne prennent pas en compte la diversité des situations et reposent sur celles et ceux qui sont d’ores et déjà confrontés à la précarité énergétique.
Dans ce domaine comme dans celui de l’habitat indigne, le Conseil départemental accompagne les ménages modestes qui veulent accéder ou se maintenir dans un logement décent. Près de 2 500 aides financières sont ainsi accordées chaque année auxquelles s’ajoutent 1 600 interventions contre la précarité énergétique.
Ces aides seront réévaluées dans le cadre du FSL énergie à l’occasion du débat budgétaire qui s’annonce afin de tenir compte de la hausse des prix de l’énergie comme cela a été annoncé dans le Projet départemental. Elles contribueront à la préservation du pouvoir d’achat des Meurthe-et-Mosellans les plus fragiles et les plus modestes.
C’est aussi dans ce contexte que l’accès aux droits sociaux doit demeurer une priorité. Il est plus que jamais indispensable que les allocations, filets de sécurité pour les plus fragiles, répondent à leurs fonctions protectrices. C’est notamment pour cette raison que l’expérimentation territoire zéro non-recours pour laquelle nous nous portons candidat est importante. Inspirée par les réflexions d’ATD Quart Monde et basée sur le « aller vers » les plus fragiles, elle sera déposée en partenariat avec la Métropole du Grand Nancy.
Le plan de sobriété énergétique départemental que j’ai souhaité, est évidemment en cohérence avec notre stratégie environnementale. Nous en avons précisé les fondements dans le cadre du Projet départemental. Il connait d’ores et déjà des déclinaisons concrètes.
Je pense évidemment à l’ouverture, à l’occasion de cette rentrée scolaire, du premier collège à énergie positive du Grand Est dans le quartier ARTEM : le collège Niki-de-Saint-Phalle.
Depuis maintenant 10 ans, ce sont 10 opérations de construction ou restructuration à neuf réalisées et de nombreuses restructurations partielles ont été l’occasion de mettre en œuvre des critères environnementaux avec l’utilisation de matériaux biosourcés. Et le rythme s’accélère, avec plus de 20 opérations en cours, en étude ou initiés durant notre mandat.
En cela, le futur collège du plateau de Haye sera exemplaire en utilisant de la terre cuite en lieu et place du béton tant consommateur d’eau et d’énergie lors de sa production. Nous développons également des objectifs en matière de bonne gestion des eaux pluviales. Ces ambitions garantissent la réalisation de bâtiments sains, performants, confortables et économes.
Plus concrètement, notre politique environnementale se traduit, à l’occasion de la session qui s’ouvre, par deux rapports. L’un portant sur l’adaptation du dispositif de subvention biodiversité-paysages au regard des objectifs du projet départemental et l’autre concerne la charte agricole départementale
Cette dernière, en complément des actions menées par la collectivité en faveur de l’agriculture, renouvelle son appui à la profession agricole qui s’engage dans la transition écologique. Elle prévoit de multiples actions en matière de circuits de proximité, d’agriculture biologique, de préservation de la biodiversité, de plantations de haies, d’innovation écologique, d’actions éducatives et de sensibilisation au volet environnement de la politique agricole commune.
Pour conclure, permettez d’évoquer les drames estivaux qui ont marqué notre pays à commencer par la Gironde, département le plus durement touché. Mais également le Maine-et-Loire, la Drôme, l’Aveyron, les Vosges et le Jura… Les incendies y ont provoqué des drames humains et ont défiguré nos paysages. Ce sont plus de 64000 ha de forêt qui ont ainsi été dévastés ; ce qui représente environ 6 fois la superficie de Paris intramuros.
Illustrations tangibles, avec la canicule, du dérèglement climatique, ces sinistres ont aussi mis en lumière le courage et le professionnalisme de nos sapeurs-pompiers. Ils ont relevé ces défis dans le cadre de coopérations entre les différents SDIS de France et avec la mobilisation de nos voisins européens.
En Meurthe-et-Moselle, ce sont plus de 80 sapeurs-pompiers qui ont été mobilisés hors du département ; prêtant ainsi main forte à leurs collègues.
C’est fort du soutien de l’ensemble de notre Assemblée au développement et au fonctionnement de notre SDIS, et, par conséquent, en notre nom à toutes et tous, et j’associe plus particulièrement Bernard Bertelle président du conseil d’administration du SDIS, que je souhaite rendre un vibrant hommage à tous les professionnels du Service d’incendie et secours de Meurthe-et-Moselle. Ils luttent quotidiennement, et parfois au détriment de leur vie, pour la sécurité de nos concitoyens et concitoyennes et la réservation de notre patrimoine naturel.
Je pense aux sapeurs-pompiers, bien évidemment, mais aussi à toutes celles et tous ceux qui, à leurs côtés, assurent d’essentielles fonctions de soutien.
Un hommage que Bernard Bertelle et moi-même auront l’occasion de rappeler cet après-midi lors de l’inauguration du Congrès National SDIS qui se tient cette année en Meurthe-et-Moselle à Nancy et Vandoeuvre.
J’ai aussi souhaité que notre collectivité amplifie son encouragement à l’engagement des jeunes pompiers volontaires. Car, même si la crise des vocations est moins aigüe en Meurthe-et-Moselle que dans d’autres département, les incendies estivaux ont mis en lumière le constat d’un progressif désengagement à l’égard de ce volontariat.
Ainsi, en complément des actions de sensibilisation et de premiers secours d’ores et déjà déployées dans nos collèges, le Conseil départemental proposera à ses divers publics de participer à la découverte du métier de sapeurs-pompiers dans les centres d’intervention ainsi que dans ses services départementaux de proximité.
Cet accompagnement s’inscrit dans le partenariat fort qui nous lie au SDIS 54. Je pense notamment à notre soutien en investissement permettant la création, la rénovation de casernes telles que la future caserne Nordonou les dizaines decasernes de proximité pour lutter contre les fractures territoriales et proposer un service public de sécurité civile au plus près des territoires, au plus près des habitants.
Voilà, chers collègues, les quelques réflexions que je souhaitais partager avec vous à l’occasion de cette rentrée également marquée par des décisions élyséennes qui inquiètent jusque dans les rangs de la majorité gouvernementale.
Je pense à la réforme des retraites mais aussi à l’abandon de la perspective d’une loi Grand âge pourtant plus que jamais nécessaire.
Gageons que nous aurons l’occasion d’y revenir au cœur de l’automne. J’exprime cependant le souhait que le Gouvernement soit soucieux de paix et de cohésion sociale et qu’il ait tiré les leçons de l’inefficacité de la brutalité en politique.
Notre pays a besoin de se rassembler.
Je vous remercie.
Chaynesse KHIROUNI
Présidente du Département de Meurthe-et-Moselle