Session de juin 2019 |Rapports
Lutte contre la pauvreté
Déclinaison de la contractualisation Etat/Département de Meurthe-et-Moselle
Rapporteur : Agnès Marchand, vice-présidente déléguée à l’enfance, la famille, le développement local et la santé
Intervention de Valérie BEAUSERT-LEICK
1ère vice-présidente
Seul le prononcé fait foi.
Monsieur le Président, Mes cher.e.s collègues,
En premier lieu, j’aimerais – au nom de notre groupe socialiste, écologiste et républicain – remercier à nouveau l’ensemble des participants et des contributeurs au plan de lutte contre la pauvreté, qui se sont mobilisés très nombreux lors des conférences territoriales. Je remercie également les professionnel.le.s du Département qui ont été particulièrement engagé.e.s sur toutes les phases d’élaboration de notre stratégie.
Il y a eu une formidable dynamique départementale autour des enjeux de lutte contre la pauvreté et on peut dire que cela nous a motivés et nous conforte dans notre rôle de département démonstrateur. Il s’agira bien sûr de concrétiser ces engagements dans nos résultats.
En effet, n’oublions pas que la demande sociale et les attentes sont fortes Les travailleurs sociaux du Département et les professionnels de nos structures partenaires peuvent témoigner des difficultés qu’ils rencontrent quotidiennement.
La contractualisation proposée à travers la stratégie de lutte contre la pauvreté s’appuie sur un engagement partagé avec l’Etat, mais un engagement de court terme.
Comme l’a évoqué ma collègue Agnès Marchand, nos réserves quant à la stratégie du gouvernement pour lutter efficacement contre la pauvreté demeurent. Notre dispositif peut sembler insuffisant, car il est de la responsabilité nationale de combattre réellement et efficacement la pauvreté, véritable fléau dans une société qui est quand même la 6ème puissance économique mondiale. En effet, les intentions affichées par le gouvernement sont globalement bonnes, mais peut-on objectivement lutter contre la pauvreté à budget constant ?
Je pense aux objectifs de lutte contre le non-recours et l’automatisation du versement des aides qui imposerait d’abonder l’enveloppe de plus de 3 milliards d’€.
Je pense au périmètre d’application du Revenu universel d’activité. Le gouvernement fera-t-il (enfin) du RUA la prochaine conquête sociale des jeunes ?
Pouvons-nous attendre 2023 pour la mise en œuvre du RUA ?
Quoi qu’il en soit, la réussite de cette refonte des minima sociaux réside, selon nous, dans leur inconditionnalité.
Revenons à notre département, nous avons déjà discutées à plusieurs reprises des grandes orientations déclinées dans la contractualisation qu’il vous est proposé de valider.
J’aimerais revenir sur un scandale sanitaire et souligner un axe essentiel de notre intervention : c’est celui de l’ALIMENTATION, celui de l’impératif de dignité dans l’accès à l’alimentation.
La fraude aux « faux steaks hachés » révélée récemment nous montre en effet les limites de notre système d’aide alimentaire, dans une société pourtant dite de progrès. Une société où des gens peu scrupuleux font du business sur le dos des plus pauvres. Une société où l’on considère que des steaks de “viande” achetés 3 ou 4 euros le kilo par appel d’offres XXL puisse être de qualité, le tout sans faire de perdants dans la chaîne de distribution.
Avec 780 tonnes déjà distribuées sur les 1 500 tonnes achetées, cette fraude massive est un coup d’épée dans le dos aux acteurs de la lutte contre la précarité alimentaire ; aux bénévoles qui donnent de leur temps sans relâche pour assurer la distribution de nourriture ; aux bénéficiaires qui franchissent parfois difficilement les portes d’un resto du cœur, d’un secours populaire, d’une banque alimentaire, de la croix-rouge ou de toute autre association d’aide alimentaire.
Pour moi, ce n’est pas juste un acte de tromperie, c’est un acte d’ignominie !
Une ignominie, alors que les associations craignent une baisse drastique du fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD) dans la prochaine programmation budgétaire européenne. Le FEAD c’est cet outil qui permet par exemple aux Restos du cœur de financer 1 repas sur 4 aujourd’hui.
Il est temps de cesser de faire des économies sur le dos des plus précaires.
Dans ce contexte et comme l’ont souligné de nombreux partenaires lors des CTDS et de leur préparation, il paraît plus que nécessaire de construire des réponses locales, à taille humaine, pour redonner de la « dignité dans les assiettes ».
C’est le sens de la démarche initiée en Terres de Lorraine et dont le forum a réuni 400 personnes en mars dernier.
C’est le sens de notre démarche en faveur d’une restauration scolaire accessible et de qualité, et c’est l’enjeu d’une tarification sociale incitative.
C’est encore le sens de notre action pour favoriser l’engagement citoyen.
Alors non, nous ne singeons pas les romains. Et je conclurai mon intervention par ces paroles de Mère Thérésa :
“Le pauvre n’a pas faim seulement de pain, il a aussi terriblement faim de dignité humaine.”
Je vous remercie.