SESSION DU 25 SEPTEMBRE 2017
QUESTION D’ACTUALITÉ AU PRÉFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE
Pascal SCHNEIDER, conseiller départemental du canton de Neuves-Maisons
Retard des paiements des aides de la PAC par l’ASP
Monsieur le Préfet,
Alors que l’agriculture française traverse une crise importante, nos agriculteurs sont confrontés à un retard vertigineux des paiements des aides de la politique agricole commune (PAC) par l’Agence de services et de paiements (ASP).
Si la nouvelle PAC a brillé par sa complexité, entraînant l’obligation par les services de l’Etat de reprendre les surfaces d’exploitation pour ajuster les aides, force est de constater un dysfonctionnement administratif réel couplant problèmes de gestion des dossiers et logiciel défectueux.
Les annonces de paiements de calendriers se sont succédé et les reports aussi.
Ce retard de paiement des aides a des conséquences dramatiques pour nos agriculteurs : manque de trésorerie, refus des banques d’accorder des prêts, mise en péril de la viabilité des exploitations. Des agriculteurs se retrouvent confrontés à des plans de continuation d’activité qui arrivent à échéance.
Alors que nous essayons d’encourager l’agriculture bio, certains agriculteurs ne sont pas payés depuis 2 ans. En Meurthe-et-Moselle, le département a décidé de ne pas rester les bras croisés et nous allons proposer au vote à cette session, la mise en place d’un dispositif d’avance de trésorerie sur les aides européennes aux exploitants bio. Il n’est toutefois pas normal qu’un département doive se substituer à l’Etat pour secourir les agriculteurs.
Cet été le ministre de l’Agriculture a demandé à l’Agence de services et de paiements (ASP) de renforcer ses moyens humains. Il a également fixé des priorités en matière de calendrier de paiement, prévoyant une première phase en novembre 2017 pour les aides 2015 et en mars 2018 pour les aides 2016.
Monsieur le Préfet, face à l’urgence de la situation, pouvez-vous nous indiquer quel calendrier du versement des aides est aujourd’hui en mesure de s’appliquer ?
Et quelles mesures pourront être mises en place à l’avenir pour éviter qu’un tel dysfonctionnement administratif ne se reproduise ?
Je vous remercie.
Réponse de M. le Préfet
Monsieur le conseiller départemental,
je tiens tout d’abord à préciser que l’ensemble des aides de la PAC qui relèvent de la seule compétence de l’État (aides découplées, aides couplées végétales, aides animales, ICHN, assurance récolte) sont payées pour les campagnes 2015 et 2016. Cela représente environ 73 millions d’euros pour chacune de ces deux années.
Les dernières aides restant à solder pour 2015 et 2016 sont les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEc) et le soutien à l’agriculture biologique (conversion et maintien). Cela concerne environ 460 exploitations pour 2015 et 500 pour 2016.
L’ensemble des aides PAC déjà versées pour les campagnes 2015 et 2016 représente 96 % du montant total estimé.
La réforme de la PAC, entrée en vigueur en 2015, a effectivement été complexe à mettre en place. En parallèle, les services de l’État ont été très mobilisés par la révision des surfaces aidées, sur demande de la Commission européenne et afin d’éviter de lourdes amendes financières sur la période 2008-2012. Cela a fortement augmenté le temps d’instruction des dossiers.
Par ailleurs, la réforme s’est conjuguée avec le transfert de l’autorité de gestion des aides du second pilier (développement rural) aux Conseils Régionaux, qui pour certains (et c’est notre cas) ont mis en oeuvre peu de temps après, une fusion des Régions.
Tout ceci a rendu très complexe le développement des outils informatiques nécessaires à l’instruction de l’ensemble de ces aides.
L’État a assumé ces retards de paiement en mettant en place des apports de trésorerie remboursables pour les aides du premier pilier, l’ICHN, les MAEc et les aides à l’agriculture biologique, à la fois au titre de 2015 et de 2016. Il s’agit d’une mesure exceptionnelle, que n’ont pas prises d’autres États membres confrontés à des difficultés de calendrier.
Le traditionnel acompte de 50 % en octobre pour les aides du premier pilier a ainsi été remplacé par le versement d’une avance représentant 90 % des aides.
Pour les MAEc et les aides à l’agriculture biologique, des avances de 80 % ont été proposées. Pour la majorité des exploitants concernés, les montants restant à percevoir représentent donc 20 % des aides.
Des plafonds ont été appliqués à ces apports de trésorerie remboursables par nécessité d’équité nationale, certaines autorités de gestion ayant défini des plafonds pour les aides qu’elles attribuent. Je sais que, pour certaines exploitations, les montants restant à percevoir sont importants. J’ai porté cette question auprès du ministère de l’agriculture et demandé le versement par l’État d’un apport de trésorerie complémentaire. Néanmoins, il n’était pas possible de mettre en oeuvre des avances différenciées par région, la priorité du ministère et de l’ASP étant de faire aboutir l’instruction de l’ensemble des dossiers pour permettre le paiement du solde des aides dès que possible.
Je salue ainsi l’initiative du Conseil Départemental de proposer une avance complémentaire pour les exploitants concernés en conversion bio.
Le paiement du solde des dernières aides est maintenant proche pour la campagne 2015, comme le prévoit le calendrier annoncé par le Ministre Jacques MEZARD le 21 juin et confirmé plusieurs fois depuis par le Ministre Stéphane TRAVERT.
Les premiers paiements des aides MAEc et agriculture biologique 2015 interviendront en novembre.
Les services de la Direction Départementale des Territoires instruisent actuellement ces dossiers, et je peux vous assurer que leur mobilisation est totale pour les faire aboutir le plus rapidement possible. Une fois l’instruction finalisée par la DDT, le calendrier de paiement sera entre les mains de l’autorité de gestion et des financeurs. L’ASP mettra les dossiers en paiement dès qu’elle aura reçu leur feu vert.
Le calendrier annoncé prévoit ensuite les premiers paiements des aides MAEc et agriculture biologique 2016 en mars prochain. Là aussi, mes services assureront leur part d’instruction dans les délais impartis.
L’État assume également le retard de paiement des aides au titre de 2017. Un nouvel apport de trésorerie remboursable va être mis en oeuvre à partir de mi-octobre. Il représentera de nouveau 90 % des aides du premier pilier et de l’ICHN, et 80 % des aides MAEc et agriculture biologique. Les aides du premier pilier seront ensuite soldées en février 2018, et les premiers paiements pour les aides MAEc et agriculture biologique devraient intervenir à partir de juillet 2018.
2018 devrait revenir à un rythme normal concernant le premier pilier avec un acompte de 50 % des aides au 15 octobre et un solde au début du mois de décembre. Pour les aides du second pilier, le calendrier reste à préciser avec l’autorité de gestion, le Conseil Régional.
Une démarche de retour d’expérience a été engagée depuis plusieurs mois par le ministère de l’agriculture, afin de définir et mettre en place des mesures correctives pour que la prochaine réforme de la PAC se mette en oeuvre dans de meilleures conditions.