Session départementale du 22 novembre 2021 | Questions d’actualité
Jennifer BARREAU, conseillère départementale du canton de Pont-à-Mousson, déléguée du territoire Val de Lorraine
Revenu d’émancipation des jeunes
Réponse de la présidente du Conseil départemental de Meurthe-et-Moselle, Chaynesse KHIROUNI
Cher.e.s collègues,
Nous avons tous été heurtés par les files de jeunes qui se sont allongées ces derniers mois devant les points de distribution d’aide alimentaire. Ces images n’étaient pas dignes d’un pays qui se dit « développé ».
La crise aura au moins eu l’avantage de mettre sur le devant de la scène cette précarité de la jeunesse, accentuée par les confinements successifs mais – vous le savez – qui existait déjà auparavant.
Malheureusement, elle a aussi eu des effets délétères sur l’insertion des jeunes, sur leur niveau de vie et leur santé mentale. Fin 2021, la situation des moins de 25 ans est préoccupante, avec 38% d’entre eux qui travaillent dans le cadre d’un contrat précaire et un jeune sur six ayant arrêté ses études.
Pour faire face à l’urgence sociale, le Département de Meurthe-et-Moselle a renforcé son soutien aux épiceries solidaires par l’intermédiaire de la Banque Alimentaire qui les fournit. Nous avons également cofinancé un dispositif de soutien psychologique aux étudiants et maintenu le système de bourses départementales. Enfin, la collectivité s’est exprimée avec force, en vain, pour l’ouverture des minimas sociaux aux jeunes de 18 à 25 ans.
Mais au-delà des mesures curatives, la situation des jeunes appelle une action publique renforcée capable d’engager une réforme en profondeur des minimas sociaux actuels.
Une société responsable et tournée vers l’avenir est une société qui agit pour la jeunesse et se donne les moyens de favoriser son émancipation.
Alors que la situation nécessite une mesure ambitieuse, ce contrat d’engagement jeunes proposé par le gouvernement est un nouvel effet d’annonce qui traduit le manque de courage du gouvernement actuel.
Le Département de Meurthe-et-Moselle fait le choix de mettre les jeunes au cœur du mandat qui s’ouvre. Convaincue que favoriser l’émancipation de la jeunesse c’est investir pour l’avenir, notre collectivité porte depuis plus de vingt ans des politiques audacieuses et ambitieuses en matière de lutte contre la pauvreté des enfants, d’éducation et de citoyenneté.
Dans un contexte de crise qui renforce les incertitudes des jeunes sur leur avenir, nous devons leur donner les conditions pour qu’ils retrouvent confiance. Nous sommes convaincus au sein de cette majorité, que cela passe avant tout par l’accès à un revenu minimum de subsistance.
Le projet d’expérimentation territoriale d’un revenu de base ciblé vers les jeunes fera partie des priorités de ce mandat et sera au cœur des orientations que je souhaite lui donner au sein de cette majorité de gauche et écologiste.
Nous nous inscrivons dans la continuité des mandats précédents qui ont avancé sur la définition de ce projet. En 2018, l’expérimentation territoriale d’un revenu de base nous a été refusée par le gouvernement. Le mandat qui s’ouvre doit être celui de sa concrétisation.
Le projet de la Meurthe-et-Moselle n’est pas unique et nous pourrons capitaliser sur l’expérience des autres conseils départementaux qui travaillent également sur des projets de revenu de base.
En matière législative, la possibilité d’expérimenter pour les collectivités territoriales est permise par la Constitution depuis sa révision en 2003. Toutefois, le code général des collectivités territoriales conditionne les expérimentations locales à une l’adoption d’une loi d’expérimentation.
Nous attendons de l’Etat qu’il nous accompagne dans ce projet, et qu’il ne fasse plus valoir l’argument qu’il porte lui-même un dispositif identique, alors que ce contrat d’engagement jeunes démontre une nouvelle fois le contraire et ce un an après l’abandon du projet de Revenu Universel d’Activité. L’esprit du contrat d’engagement jeunes n’est pas celui d’un revenu de base, et il serait, j’en suis convaincue, tout à fait complémentaire avec une expérimentation locale portée par le Département.
L’expérimentation d’un revenu s’inscrit parfaitement dans l’esprit de la loi 3DS qui réaffirme les principes de décentralisation et de différenciation des collectivités locales, qui doivent pouvoir adapter leur intervention aux réalités de terrain.