Discours d’investiture de Valérie BEAUSERT-LEICK à la fonction de présidente du Département

Session du 13 juillet 2020

Seul le prononcé fait foi.

Chers collègues,

Merci pour votre confiance, je pense que vous le devinez : je suis particulièrement émue d’être la première femme élue à la tête de notre collectivité, et d’ajouter en même temps une touche de mixité sur la photo de famille – décidément encore très masculine – des départements du Grand Est. Je mesure la responsabilité qui est la mienne au regard de tous les combats menés pour que les femmes soient reconnues à leur juste place.

En 2014, à la suite d’un tragique accident que chacun d’entre nous garde en mémoire, notre collègue Michèle Pilot s’était déjà tenue devant vous, à cette place.

Et je veux saluer ici ton engagement Michèle.

Ton engagement comme celui de l’ensemble des élues, des conseillères générales puis départementales, qui sont arrivées en nombre dans cet hémicycle en 2015.

Elles ont contribué, je crois, à amorcer un changement de regard, parfois à bousculer certaines pratiques, mais aussi à insuffler un vent de renouveau au sein de notre institution.

Je ne suis donc pas une pionnière mais c’est un grand honneur d’exercer à vos côtés et de marcher dans les pas de toutes celles qui ont porté, parfois au péril de leur vie, l’émancipation et la reconnaissance des femmes en tant que citoyennes à part entière.

A l’évidence, il nous reste encore du chemin à parcourir pour reconnaître la juste place de chacun dans notre société, quel que soit son genre ou son origine. C’est la raison pour laquelle je tenaisà rendre hommage à toutes celles et à tous ceux qui se sont battus et se battent aujourd’hui encore pour faire valoir leurs droits et tout simplement pour un monde meilleur, plus juste.

Peut-on tolérer, en ce début de 21ème siècle, que l’accès à une alimentation digne, à un toit, aux soins ou encore aux protections périodiques ne soient pas reconnus comme un droit universel ?

Est-il acceptable pour un pays qui se targue d’être la 6ème puissance économique mondiale que 15 % de nos concitoyens vivent sous le seuil de pauvreté ?

Cela me révolte encore aujourd’hui et c’est bien ce sentiment de révolte contre toute forme d’injustice et de discrimination qui a structuré mon parcours professionnel et militant, et qui explique les choix que j’ai portés.

Ces combats sont la colonne vertébrale de mon parcours.

Celles et ceux qui me connaissent le savent : présider cette assemblée n’a jamais constitué pour moi ni une vocation, ni un plan de carrière, ni une fin en soi.

Pour autant, c’est une responsabilité que j’assumerai avec détermination, énergie et grand plaisir car elle s’inscrit dans le prolongement de mes engagements.

Je veux ici remercier Mathieu pour sa confiance et son soutien : entrer pour la 1ère fois en politique et se voir ainsi confier une première vice-présidence … comment dire ? …inconscience ? …folie ?

En tout cas, je n’y étais pas préparée, et je l’avoue, cela a été pour moi très difficile d’évoluer en vie politique.Aussi, merci à tous mes proches, à mes amis, à mes collègues de travail, aux agents du département et aux élu(e)s pour leurs conseils, leur accompagnement et leur soutien continu.

Votre attention et votre bienveillance ont été essentiels.

Un clin d’œil à mon fils Lâm, qui, par sa fougue, les colères de sa jeunesse et son impétuosité, m’interpelle régulièrement, me bouscule et me permet toujours des questionnements salutaires.

Je sais qu’il n’a pas toujours compris tout ce temps passé à faire vivre mes valeurs professionnellement, syndicalement et en tant que citoyenne. Mais je sais aussi qu’il en éprouve un profond respect.

Enfin, merci à Denis, mon mari, mon compagnon de route, un compagnon également engagé et militant : merci pour ton soutien et ton épaule … et aussi pour ta très grande patience (quand on a été berger, on ne se refait pas !), patience qui va encore et de plus en plus être mise à rude épreuve !

Aujourd’hui, à travers cette nouvelle responsabilité, il me revient de porter et de défendre notre projet de reconquête républicaine des territoires et son bilan.

Je suis fière d’appartenir à une majorité large et diversifiée, qui va du centre au Front de Gauche, en passant par les écologistes et les socialistes.

Je tiens ici à remercier tout particulièrement Michèle PILOT et André CORZANI, présidents de leur groupe respectif, pour leur esprit constructif.

Je veux également saluer mes collègues de l’UDC et dire à Luc BINSINGER que je m’attacherai à maintenir un dialogue apaisé avec le groupe d’opposition, qui conservera, s’il le souhaite, la présidence de la commission finances et la délégation territoriale du Lunévillois.

La démocratie s’exerce ici de la meilleure des manières et je m’en félicite.

Revenons sur notre projet départemental et le déploiement de nos politiques publiques…

Comment ne pas évoquer à nouveau un engagement qui me tient particulièrement à cœur, celui de la lutte contre la pauvreté, un ouvrage qu’il faut sans cesse remettre sur le métier, que ce soit pour protéger les enfants dont nous avons la responsabilité, pour accompagner nos concitoyens vers la formation et l’emploi, pour permettre à chacun de se déplacer, d’accéder à une alimentation de qualité, de vivre dans un logement décent, d’avoir accès à la culture, aux sports, aux loisirs.

Le Plan Collèges Nouvelles Générations, en ce qu’il facilite un accès à une restauration scolaire de qualité et socialement tarifée, mais aussi à travers la restructuration ou la construction de nouveaux collèges, répond aussi à cet objectif de lutte contre la pauvreté : car nous portons très haut cette ambition d’une réussite scolaire pour tous les jeunes meurthe-et-mosellans quel que soit leur territoire et leur milieu social d’origine.

Tout cela rejoint nos combats pour l’autonomie et l’inclusion de tous les Meurthe-et-Mosellans : un tiers d’entre eux aura plus de 60 ans en 2050. L’enjeu est de taille, nous en avons bien pris la mesure dans le cadre des Assises de l’autonomie, qui appellent à une véritable réforme structurelle de l’accompagnement du vieillissement de la population.

Je pense enfin à notre souci constant pour intégrer toutes les transitions :

Démographique, je l’ai évoquée

Numérique : c’est dans cet esprit que l’ensemble des Meurthe-et-Mosellans seront connectés à la fibre optique dès 2022 dans le cadre d’un partenariat original avec la Région Grand Est.

Ecologique et économique :

C’est le sens de notre soutien à l’ensemble des démarches écoresponsables portées sur les territoires,

C’est également le sens de notre soutien au secteur de l’économie sociale et solidaire,

Et c’est enfin le sens de notre soutien au monde agricole en ce qu’il permet une production diversifiée, de qualité et de proximité.

Ces transitions doivent pouvoir être portées ensemble par les quatre départements lorrains : la Meurthe et Moselle s’y engage et s’y engagera résolument. Car la Lorraine – et je suis sûre que nous en sommes toutes et tous convaincus – a des atouts majeurs lorsqu’elle est rassemblée au sein de la Région Grand Est et au sein de la Grande Région avec nos amis transfrontaliers.

Je ne vais pas balayer aujourd’hui tous les chantiers que nous avons engagés depuis le début de ce mandat, et qui s’inscrivent dans la continuité des combats menés ici depuis 1998. Mais j’ai naturellementune pensée pour Michel DINET et ses compagnons de route, qui ont posé, il y a plus de 20 ans les bases d’une collectivité résolument proche et solidaire, ancrée dans la diversité de ses territoires.

Et parce que j’ai conscience de ce qui m’a nourrie, je citerai un certain Jacques CHEREQUE :

« La France est morcelée dans 36000 communes, dans nombre de syndicats et groupes d’intérêt divers et souvent opposés. Il faut un lieu de cohésion et de cohérence. C’est le territoire local. Dès lors il faut refonder la décentralisation (et il ajoute) L’action appartient désormais à ceux qui vivent autre chose que leur avenir personnel ou celui de leur idéologie partisane ».

C’est cette philosophie du « Faire ensemble », dans un Territoire, avec toute la richesse, la diversité et l’intelligence collective des acteurs locaux que je me suis attachée à faire vivre tout au long de mon parcours professionnel,  et plus récemment, avec vous, au travers de notre politique d’appui aux territoires.

A l’aune des défis qui sont devant nous, j’ai la conviction que les enjeux climatiques, économiques, démographiques, solidaires et sanitaires trouveront leurs réponses dans le « faire local ».

La crise sanitaire que nous venons de traverser est, à ce niveau, un révélateur de ces enjeux et transitions.

Cette crise,qui n’est pas encore totalement derrière nous, a durement éprouvé nos territoires et nos concitoyens, avec de lourdes conséquences économiques, sociales et territoriales.

Nous sommes et serons présents cet été, en responsabilité, face aux risques qui pèsent sur notre industrie, je pense évidemment à Saint-Gobain, à Renault ou à Baccarat, mais aussi à l’ensemble de notre tissu économique qui appelle à la plus grande vigilance.

Plus largement, cette crise inédite renforce notre détermination à voir enfin aboutir un véritable processus de décentralisation, basé sur un nouveau Pacte de confiance, et à engager une réforme structurelle de notre système de santé et de solidarité.

Elle nous aura aussi permis de mesurer la capacité d’adaptation et de réactivité du service public départemental, comme de saluer l’extraordinaire potentiel d’engagement et de solidarité dont ont su faire preuve les Meurthe-et-Mosellans.

Dans ce contexte, 2021 sera l’année de tous les défis, à commencer par le défi démocratique avec la perspective durenouvellement de notre assemblée.

Notre « jeune » département fêtera l’année prochaine ses 150 ans.

Une histoire courte mais intense, faite de conflits et d’annexions, d’aventures industrielles et minières, d’innovations sociales et territoriales, mais surtout de brassages et d’échanges.

Nous nous sommes construits dans ce creuset républicain, grâce à l’apport et à la diversité de populations venues du monde entier.

Cette ouverture sur le monde et sur l’Autre fait partie de notre ADN et vous pourrez compter sur la militante anti-fasciste et anti-raciste que j’ai été (et que je suis toujours !) pour y porter une attention constante.

Notre situation géographique au cœur des pays fondateurs de l’Europe constitue une opportunité exceptionnelle pour nos territoires, si tant est qu’elle permette un véritable co-développement de part et d’autre des frontières.

C’est pourquoi je serai également très attentive à maintenir un dialogue franc et constructif avec notre voisin luxembourgeois et nos partenaires de la Grande Région transfrontalière.

Nous savons d’où nous venons, où nous voulons aller et c’est collectivement que nous parviendrons à porter des réponses adaptées, opérationnelles, pertinentes et ambitieuses aux défis d’aujourd’hui et de demain, que nous répondrons aux attentes et aux besoins de nos concitoyennes et de nos concitoyens.

En conclusion chers collègues, je veux remercier Mathieu Klein, en mon nom et au nom de l’assemblée départementale, pour tout le travail qu’il a accompli pendant ces 6 dernières années au service des Meurthe-et-Mosellans et de leurs territoires.

Les Nancéiennes et les Nancéiens qui ont fait un choix net et sans appel pour le changement le 28 juin dernier ne s’y sont pas trompés : ils ont élu un homme bienveillant, doté d’une hauteur de vue peu commune (je ne fais pas référence à sa taille) et d’un sens de l’engagement au service du public hors du commun. Bravo à toi Mathieu.

Ainsi, nous avons aujourd’hui une chance unique de nouer une relation de confiance et de réelle réciprocité entre le Département, Nancy, sa métropole et les territoires voisins afin de porter collectivement nos projets au bon niveau.

Saisissons cette chance, ENSEMBLE !

Je vous remercie