Question d’actualité | Anthony PERRIN sur l’aide alimentaire

Session départementale du 13 décembre 2021 | Questions d’actualité

Perspectives de la campagne d’hiver 2021/2022 d’aide alimentaire en Meurthe & Moselle

Question d’Anthony PERRIN, Conseiller départemental du canton de Nancy-2, délégué du territoire du Grand Nancy

Madame la Présidente,

Le récent rapport annuel de Caritas France rapporte qu’un Français sur dix a bénéficié de l’aide alimentaire en 2020, tandis que 27% d’entre eux se privent régulièrement de repas.

Si la précarité alimentaire augmente (8 millions de personnes sont dépendantes de l’aide alimentaire), la précarité des jeunes augmente davantage : les banques alimentaires constatent que la part des jeunes a accru de 13% en un an.

C’est dans ce contexte, accentué par la pandémie, que les associations d’aide alimentaire ont ouvert leur campagne d’hiver. Grâce à leur engagement et à celui de volontaires, des milliers de Meurthe & Mosellans pourront traverser la saison avec un peu moins de difficulté.

Je veux particulièrement saluer ces centaines de bénévoles qui se chargent de distribuer les denrées, qui tiennent des permanences dans les épiceries sociales, qui déposent des colis d’urgence ou organisent des repas partagés.

Madame la Présidente, la Meurthe & Moselle fait de la proximité et de la solidarité ses valeurs cardinales.

Dans le cadre du plan contre la pauvreté, elle est au rendez-vous à travers son appui aux initiatives locales comme celles portées dernièrement par ARELIA et LORTIE. Elle accorde également une aide annuelle aux fédérations et associations, comme la Banque Alimentaire, les Restaurants du Cœur, La Soupe pour les Sans-abris et d’autres. Cet hiver encore le Conseil Départemental sera au rendez-vous de la nécessaire solidarité.

Enfin, j’ai en mémoire l’adage que notre collègue de l’opposition qui a déclaré lors de notre dernière session, je cite : « apprendre à pêcher, plutôt que donner du poisson ».

Cette phrase, mantra du néolibéralisme, du chacun pour soi, de la condition à la défense des plus faibles, m’interpelle. En tant que socialiste, il me parait nécessaire de tendre la main et de favoriser des politiques publiques de mains tendues et de solidarité envers les plus précaires ; d’en faire toujours notre priorité pour les plus fragiles d’entre nous. Et, oui, d’imaginer de nouvelles formes de solidarité et d’y mettre les moyens, si nécessaire.

Aussi, Madame la Présidente, pouvez-vous détailler la situation précise de cet engagement et les perspectives pour cet hiver concernant la campagne d’aide alimentaire en Meurthe-et-Moselle.

Je vous remercie.


Réponse de Mme la Vice-Présidente, Rosemary LUPO

Cher-e-s collègues, Cher Anthony,

Alors que la pauvreté avait baissé entre les années 1970 et le début des années 1990, elle a fortement progressé depuis 2008 avec l’accentuation des difficultés économiques liées à la crise financière. Aujourd’hui, en France, 14 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, dont 1 enfant sur 5. 

Dans ce contexte, le Conseil départemental, garant des solidarités humaines, s’engage plus fortement encore dès 2014 contre la pauvreté. Un engagement qu’il est indispensable de poursuivre car le Gouvernement n’est pas mobilisé durablement pour sortir de la pauvreté comme le démontre son abandon de la réforme promise des minimas sociaux et du Revenu Universel d’Activité.

Le Gouvernement tend plutôt, par sa politique, à précariser davantage encore les plus pauvres : suppression des APL, moins de 1% du plan de relance consacré à la lutte contre la pauvreté, casse du régime d’indemnité chômage … Les mesures prises durant le quinquennat ont fait baissé le niveau de vie des 5% des Français les plus défavorisés selon une étude de l’Institut des politiques publiques.

Derrière des arguments de lutte contre, sans prendre un réel virage économique et social, les discours et les plans de l’Etat ne suffisent plus.

Le combat pour une vie digne et autonome continue de nous guider.

Elle irradie toutes nos politiques publiques : de l’enfance au grand âge, en passant par l’insertion, l’emploi, la scolarité, ou encore la lutte contre le surendettement et l’accompagnement global en action sociale.

Sur la période couvrant l’année 2020 et le premier semestre de l’année 2021, l’ensemble des actions contre la pauvreté sont valorisés à hauteur de 15 M€.

Parmi ces actions, l’accès à la nourriture est évidemment une priorité. La tarification sociale en cantine qui aboutit à un coût de 0,5 € pour les collégiens des familles aux revenus les plus faibles en constitue un volet ; 2 500 collégiens en bénéficient.

Bien que l’aide alimentaire ne relève pas strictement de la compétence du Département mais bien de l’Etat, le Conseil départemental de Meurthe-et-Moselle est très engagé auprès des associations qui interviennent contre la précarité alimentaire.

En 2020, nous avons versé plus de 100 000 € à la Banque alimentaire qui compte parmi ses adhérents 80 associations : Restos du Cœur, Secours Populaire, Secours Catholique ou petites associations locales qui aident à survivre à la précarité alimentaire.

Ce sont près de 270 000 € que le Département consacre chaque année à cette action et les notifications des subventions 2022 aux associations ont encore été signées la semaine dernière.

Outre l’acquisition de denrées alimentaires, le Département soutient :

  • la création de cuisines pédagogiques pour sortir de cette précarité et ça s’accompagne aussi d’un apprentissage à la nutrition ;
  • l’acquisition de camions de tournées d’aide alimentaire itinérante dans le Nord et le Sud du département permet de servir les zones les plus reculées en colis alimentaires ;
  • ou encore l’ouverture de nouveaux dépôts alimentaires pour que les territoires soient plus autonomes, plus réactifs, que les bénévoles soient mieux accompagnés dans leur engagement.

Je pense par exemple au nouveau dépôt de Crusnes, ouvert en octobre dernier et que le Département a contribué à financer à hauteur de 30 000 €, et à toutes nos associations qui œuvrent sur nos territoires.

En 2019, avant la crise sanitaire, un diagnostic départemental sur la précarité alimentaire montrait que le nord du département et notamment le Piennois et le Longuyonnais ne bénéficiaient pas d’une couverture satisfaisante en matière d’aide alimentaire.

Dans ces territoires, 1 110 familles ont été accueillies en 2020 dont au moins 179 ont eu besoin d’une ou plusieurs aides alimentaires d’urgence.

Accompagné par les associations, les citoyens bénévoles, les collectivités territoriales que je remercie ici pour leur engagement auprès de nos populations.

Cher collègue, tu as cité quelques associations actives dans le domaine de l’aide alimentaire et je t’en remercie. Car c’est grâce à ces dizaines d’associations, à ces bénévoles, à ce maillage qu’ils organisent dans nos territoires, en proximité avec les travailleurs sociaux du Départements, les communes, les CCAS, que nous disposons d’un réseau efficient qui doit se poursuivre dans le cadre de la distribution alimentaire.

C’est la raison pour laquelle nous pouvons appréhender l’hiver en espérant un peu de douceur. D’autant que le dispositif de distribution alimentaire s’est renforcé au bénéfice de la crise sanitaire et notamment au lendemain du 1er confinement.

Nous constations, en effet, une forte augmentation de la participation aux distributions alimentaires alors que les stocks des associations avaient été largement épuisés durant le confinement.

L’Etat et le Département ont alors augmenté leurs subventions en favorisant, dans le même temps, les achats groupés de produits locaux. Cette démarche illustre la réactivité du dispositif et devrait contribuer à nous rassurer un tout petit peu. Elle permet de combiner solidarité et soutien aux producteurs.

Si ces mesures d’aide sont indispensables et assurées avec dévouement, demeure toutefois la question de fond de l’apparente impossibilité qu’ont nos sociétés riches à ne pas créer de pauvreté, qui ne cesse de s’accroître.

Comment ne pas douter de l’efficacité de nos politiques publiques quand on estime à 6 générations le temps nécessaire à une famille pour sortir de la pauvreté ? Comment croire dans les valeurs républicaines quand la réalité sociale quotidienne les contredit jour après jour pour tant de nos concitoyens ?

Je vous remercie.